Cri du cœur d’un propriétaire de logements pris à la gorge

le mardi 19 septembre 2023

L’achat d’un édifice à revenu peut être une option pour certains épargnants qui visaient remplir leur bas de laine. Mais pour un propriétaire de deux immeubles à logements de Châteauguay, la situation se transforme en cauchemar. Les hausses subséquentes du taux directeur mettent en péril sa santé, autant financière que psychologique.

«C’est rendu que je fais de l’anxiété, révèle celui qui a demandé de préserver son anonymat. Je me réveille la nuit avec le cœur qui débat. Un immeuble à logements, c’est un paquet de trouble en ce moment. C’est devenu un immeuble à dépenses.»

En 2019, il a acheté un édifice à huit logements sur le boulevard Saint-Joseph. Les taux hypothécaires étaient alors au plancher. Ses situations, familiale et professionnelle, permettaient à son couple de : «passer à l’action», comme il dit. Deux ans plus tard, il ajoute six portes dans un autre bâtiment non loin. 

«En ce moment, on a une augmentation des dépenses d’intérêt de 85 500 $, informe notre interlocuteur. Depuis mars 2022, le taux monte. Je ne suis plus capable de payer le capital.»

Il a imposé des augmentations de loyer à ses 14 locataires au cours des deux dernières années. Vingt-cinq dollars par mois à partir de juillet 2022 et 40 $ mensuellement à partir de l’année suivante. La dernière augmentation a difficilement été acceptée et a jeté un froid avec certains locataires. Elle représente, sur un an, la somme de 10 900 $; ce qui ne correspond aucunement à l’augmentation en dépenses d’intérêt.

Cette hausse s’accompagne des augmentations de taxes municipales et de celle des assurances. «La crise du logement en ce moment, les petits propriétaires, on la paye en ciboulot, lâche-t-il. C’est la misère en chien. C’est sû que ma conjointe et moi, nous évaluons nos options.»

Le couple est épuisé. Il a besoin de 40 heures par mois pour assurer la gestion de ses immeubles. La toiture a été refaite, des galeries peintes, le stationnement ligné, etc. Le propriétaire, un homme manuel, a protégé son investissement par des travaux pour en maintenir la qualité. 

Amortissement sur 40 ans

«Il faut que les revenus augmentent sinon on va frapper un mur, insiste-t-il. J’offre des 4 ½ à 763 $/mois. Si les loyers étaient 1150 $/mois, j’arriverais égal. Et, je suis conservateur.»

Le Tribunal administratif du logement (TAL) suggérait des augmentations de loyer à 2,3 % en 2023. L’indice des prix à la consommation a progressé de 3,3 % en juillet dernier. 

«Je me sens pris en sandwich entre la Banque du Canada, le TAL et les locataires, poursuit-il. On étouffe. On s’arrache la vie dans ce projet-là.»  

Il suggère que la Banque du Canada commence à descendre le taux. Aussi, il aimerait que le gouvernement fédéral permette aux banques de prolonger l’amortissement à 40 ans, comme c’était possible auparavant, pour des édifices à logements.

Ses options

Quatre ans après l’acquisition du premier édifice, le couple évalue ses options. Il pourrait garder les blocs, en espérant que la situation revienne à la normale. Mais à quel prix?

Il pourrait également vendre. Sans que les édifices soient affichés, le propriétaire dit avoir reçu deux offres. Elles proviennent de l’étranger de gens prêts à investir pour permettre à plusieurs membres d’une même famille de venir s’établir au Canada. «Ça serait facile de mettre une pancarte à vendre, fait-il remarquer. Mais c’est un gros qui va acheter et qui va expulser des locataires pour loger sa famille. Il y aura aussi une augmentation des loyers. Ce n’est toutefois pas ce que je souhaite. »