Des proches aidants ont décliné l’invitation à raconter leur quotidien au Saint-François. Ils éprouvaient des craintes ou des appréhensions sur ce que penseraient les lecteurs. Mais pas Anne-Renée. Elle a expliqué sa vie avec Alek, son adolescent handicapé. Toujours maman, parfois proche aidante, mais 100 % aimante.
«Un moment donné ça devient mêlant de savoir c’est quoi qui est parent ou proche aidant, concède-t-elle. Je me réfère tout le temps si j’avais un enfant neurotypique.»
Alex est âgé de 16 ans. Il a un syndrome génétique considéré comme maladie orpheline appelé délétion chromosomique 1P36; qui se manifeste par un handicap physique et intellectuel.
«Mon enfant éprouve beaucoup de frustration, a-t-elle résumé. Parce qu’il sait qu’il a des limitations. Ça cause de la frustration qui l’amène vers de l’anxiété qui se manifeste par de l’agressivité.»
Ses parents doivent donc l’accompagner pour une multitude de tâches de base. Chaque jour. Si bien qu’en 16 ans, elle et son conjoint Dany n’ont jamais vécu de sortie de couple.
«Je ne suis jamais partie une nuit, explique-t-elle. Une fois quand il avait 3 ans, pour un mariage. C’est tout. On n’est jamais parti en vacances. Quand on part en vacances, souvent on part en congrès pour notre travail, on prend quelques jours de plus, mais on va partir chacun de notre côté. Jamais ensemble sans notre fils. Un voyage de couple ça n’existe pas quand proche aidant d’un enfant comme mon fils.»
Dany, Alek et Anne-Renée. (Photo : Gracieuseté)
Un rôle qui évolue
Des statistiques démontrent que 80 % des parents d’un enfant handicapé se séparent. Une vie qui n’est pas banale et de tout repos. Anne-Renée et Dany formaient en couple depuis 10 ans au moment de la naissance d’Alek. Leur union était déjà forte.
Ce qui a aidé à l’arrivée de leur enfant. Parce qu’il n’existe pas de formation de proche aidant. «Ça s’apprend sur le tas, dit celle qui occupe la présidence de l’organisme Répit Le Zéphyr. Souvent, Dany et moi, on réajuste notre stratégie. On fait des essais-erreurs. Les rôles sont articulés. J’ai la chance d’avoir une bonne résilience et de ne pas dormir beaucoup. Dans mon cas c’est aidant.»
Les parents souhaitent que leur fils évolue dans un environnement stimulant avec une belle qualité de vie. Ils en ont fait une promesse dès le jour 1. «Tu as forcément une mission, annonce-t-elle. Surtout, quand il naît handicapé, ta mission c’est de faire en sorte que le jour où tu ne seras plus là, que ton fils ait une belle qualité de vie. »
Les deux parents ont la chance d’occuper des emplois qui permettent de travailler à distance. Ce qui permet de garder un salaire, parce qu’assurer l’avenir des enfants comme Alek coûte cher, affirme Anne-Renée.
Mais aussi de s’accomplir personnellement ailleurs que dans leur quotidien avec leur fils. «Je peux comprendre que des parents n’y arrivent pas, a-t-elle dit. J’ai des amies qui se sont battues pour rester sur le marché du travail, mais même elles ont été affectées physiquement.»
Le sens du partage
Des groupes de rencontre existent pour sortir les proches aidants de leur isolement. Ce que conseille la maman-proche aidante, même si ce peut être douloureux.
«C’est important que les gens qui ont fait leur deuil viennent, lance-t-elle. Les gens sont toujours débordés tout le temps. Ils ne veulent plus revenir dans la plaie. Ça te ramène dans tes anciennes blessures. Je me dis qu’il faut le faire pour dire aux autres que tu vas passer au travers.»